*géographie aux temps anciens
Le Bassin parisien est principalement un bassin sédimentaire, qui reste immergé sous des eaux peu profondes depuis les premières étapes de l’histoire de la Terre jusqu’au plissement hercynien, survenu au Carbonifère, il y a environ 350 millions d’années. Ce plissement hercynien, qui a conduit l’émergence des massifs des Ardennes, des Vosges et du Massif central, a également provoqué le soulèvement du Bassin parisien.
Suite à cette émergence et sous des conditions climatiques chaudes et humides, le Bassin parisien s’est couvert d’une végétation luxuriante, dominée par de vastes forêts de fougères arborescentes et d’autres plantes caractéristiques de l’époque.
SOMMAIRE ** Ere Mésozoïque ** Ere Cénozoïque : ** Période Paléogène ** Epoque Eocène, Etage Yprésien, Etage Lutécien, Etage Bartonien ** Epoque Oligocène, Étage Stampien ** Période Néogène, Epoque Miocène, Epoque Pliocène, Epoque Pleistocène
Avant la lecture de ce texte, il peut être utile de consulter l’échelle des temps géologiques, avec les différentes notions, d’ère, de période, d’époque, d’étage… Echelle chronostratigrapique
1- Le Mésozoïque
Pendant le Mésozoïque, le Bassin parisien reste émergé, avec la présence de lagunes, jusqu’à la fin du Jurassique, il y a environ 144 millions d’années.
Au début du Crétacé, une transgression marine se produit, et le Bassin Parisien est de nouveau submergé pendant les 79 millions d’années que dure cette période (de 144 à 65 millions d’années).
Le cycle sédimentaire du Crétacé se termine par un important dépôt de craie blanche atteignant une épaisseur de 150 à 300 m d’épaisseur. Cette craie s’est formée dans des eaux très calmes, par le dépôt de particules de calcaires très fines légèrement argileuses, qui, à la manière d’un ciment, se sont agglomérées avec d’importantes quantités de restes organiques : fragments de coquilles de mollusques, os de poissons, débris de coraux ou de polypiers, ainsi qu’un apport considérable de phytoplanctons (algues microscopiques à test – coquille, carapace – calcaire.
Ce dépôt de craie, intensément exploitée par l’homme, est utilisé dans la fabrication de ciments artificiels.
A la fin de Crétacé, il y a 65 millions d’années, la Terre traverse une période de bouleversements majeurs : mouvements sismiques, éruptions volcaniques, changements climatiques, et chute d’un astéroïde. Ces événements d’incidence planétaire entraînent une extinction massive, avec la disparition de deux tiers des espèces animales et végétales, notamment les dinosaures et les ammonites.
>> La mer se retire brusquement du Bassin Parisien.
2- Le Cénozoïque
2-1- Période Paléogène (du grec Palaios: ancien et Genos: race > les anciennes races) (65 Ma – 23,5 Ma)
Pendant le paléogène, les effets de la tectonique alpine se traduisent par un soulèvement progressif du Bassin parisien depuis le sud-est, tout en ouvrant son accès vers la mer du Nord. Cette période est caractérisée par de nombreux cycles sédimentaires, résultat de transgressions et régressions marines successives.
La mer, avançant depuis le nord et le nord-ouest, dépose des couches sédimentaires variées : calcaires, argileuses ou sablonneuses, qui recouvrent progressivement la région parisienne. Lorsque les eaux stagnent, elles favorisent la formation de nouvelles strates ; lorsqu’elles se retirent, elles laissent derrière elles un paysage composé de lacs ou de lagunes, alimenté par des apports fluviaux. Ces milieux stagnants, aux eaux douces ou saumâtres, donnent lieu à des dépôts spécifiques jusqu’au début d’un nouveau cycle marin.
Le Bassin parisien se comporte alors comme un lagon tropical peu profond, situé au fond d’un golf ouvert sur la Mer du Nord, puis sur la Manche. Les limites du rivage évoluent constamment en fonction des transgressions et des régressions marines qui se succèdent.
Les cycles sédimentaires les plus marquants du Paléogène sont :
- Le Lutétien qui donne lieu à d’importants dépôts calcaires, base de nombreuses exploitations de pierre à bâtir en Île-de-France
- Le Bartonien, caractérisé par l’apparition des gisements de gypse, minéral essentiel pour la fabrication du plâtre
- Le Rupélien (ex Stampien), à l’origine de dépôts de sables fins blancs de très grande pureté (97 à 99% de silice), utilisés notamment pour la verrerie et dans de nombreuses applications industrielles dont les optiques de qualité.
La faune aquatique varie en fonction des caractéristiques du milieu aquatique : la profondeur, la température et type d’eau (marine, saumâtre, douce ou fluviatile – calme ou agitée). Parmi cette diversité, on retrouve des requins, des crocodiles, diverses espèces de foraminifères, des coquillages bivalves et gastéropodes, ainsi que certains cnidaires, notamment des coraux.
2-1-1 EPOQUE EOCENE (Eôs : l’aube -de la vie récente-)
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Etage Yprésien
L’étage Yprésien est nommé d’après la ville d’Ypres en Belgique. Pendant cette période, la mer dépose d’abord des argiles au Nord (ligne de rivage n°1) puis des sables jusqu’à la Seine (ligne de rivage n°2).
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Etage Lutétien
L’étage Lutétien, dont le nom est tiré du latin Lutetia (nom antique de Lutèce, aujourd’hui Paris), a été décrit pour la première fois en 1883 par Albert de Lapparent. Il est entièrement observable dans les célèbres Catacombes de Paris, offrant un aperçu exceptionnel de cette période géologique.
Durant le Lutétien, le Bassin parisien se trouvait à environ 38° de latitude nord, soit à l’emplacement actuel des îles Baléares, et bénéficiait d’un climat tropical. C’est dans ce contexte géographique et climatique qu’intervient lieu un cycle de transgressions marines autour de la ligne de rivage n°3. Ce cycle se traduit par une transition progressive de la sédimentation sableuse vers la sédimentation calcaire, aboutissant à la formation du célèbre calcaire grossier.
Près des anciens rivages, les dépôts calcaires cèdent toutefois la place à des formations de sables coquilliers (faluns), des roches sédimentaires constituées principalement d’amas de coquilles. Les faluns de Grignon, témoins de ce cycle, font l’objet d’une étude spécifique dans la rubrique «la falunière de Grignon».
Le Lutétien est particulièrement remarquable pour sa richesse paléontologique. Avec plus de 2 200 espèces de mollusques répertoriées, il représente l’étage le plus fossilifère de tout l’Éocène, dépassant largement les autres étages en termes de diversité. Le Lutétien du Bassin de Paris peut être considéré comme un véritable « point-chaud » de la paléo-biodiversité, comparable aux zones de biodiversité marine actuelles, telles que celles situées dans les mers tropicales de l’océan Indien et de l’océan Pacifique autour de la ligne Wallace.
Cette richesse exceptionnelle s’explique par plusieurs facteurs, notamment les conditions climatiques, en particulier la température de l’eau, bien que celle-ci ait été encore plus élevée durant l’Yprésien. La paléogéographie joue également un rôle clé : à cette époque, le Bassin parisien ressemblait à un archipel baigné par des eaux peu profondes. Par ailleurs, le taux élevé d’endémisme au sein de la faune contribue à cette biodiversité remarquable.
Le Lutétien se divise en trois sous-étages, chacun défini par des « marqueurs » spécifiques. Ces marqueurs, qui sont des fossiles caractéristiques de leur époque, témoignent des transitions environnementales au sein du bassin. Ils illustrent notamment le passage d’un écosystème de type océanique à un écosystème de type lagunaire, chacun accompagné de faunes et de flores adaptées à ces environnements distincts.
– Lutétien inférieur : Cette phase débute par une première transgression marine qui dépose des sables calcaires dans une mer relativement profonde (50m) et chaude en surface (environ 20/25°). Ces sables, de texture grossière et de couleur vert sombre, doivent leur teinte à la présence de glauconie, une argile verte composée de silicate et de potasse typique des eaux agitées. Ces dépôts contiennent une riche faune fossile, notamment des dents de requins, des huitres (genre ostrea) et des bivalves du genre Cardita.
À mesure que le temps passe, les fonds marins voient une accumulation massive de Nummulites laevigatus, des foraminifères spécifiques ressemblant à de petites pièces de monnaie. Ces fossiles, considérés comme des « marqueurs » du Lutétien inférieur, jouent un rôle clé dans la formation de la célèbre pierre à liards.
– Lutétien moyen : Durant cette phase, le soulèvement du Bassin Parisien par le Sud Est s’intensifie, entraînant l’interruption des apports fluviatiles provenant du Massif central. C’est à ce moment que se produit un dépôt calcaire majeur, marquant la séparation définitive entre le Bassin de Paris et le Bassin belge par le soulèvement de l’Artois. Par ailleurs, les anticlinaux de Bray (entre Normandie et Artois), de Beynes (Grignon) et Meudon commencent à émerger. Voir carte. Cet étage est caractérisé par la présence majeure de Nummulites variolarius (Photo à venir )
Les hauts-fonds se caractérisent par la formation de calcaire dans une mer tropicale calme et peu profonde. Ce calcaire est suivi par le dépôt du fameux « banc à vérins« , riche en Milliolidae (petits foraminifères de la taille d’un grain de millet) et contenant également les moules internes du remarquable Cerithium giganteum. Ce gastéropode, le plus grand connu à ce jour, pouvait atteindre une longueur de 70 cm. Son moule interne, en forme de vis ou de vérin, a inspiré le nom du banc qui le renferme.
Diverses espèces de mollusques telles que Athleta, Natica, turritella, voluta, crassimurex, sycum, arca, se rencontrent dans les dépôts du Lutétien. Certaines d’entre elles, n’ayant que peu évolué, subsistent encore aujourd’hui dans les eaux chaudes des régions équatoriales et tropicales. À cette faune s’ajoutent la présence d’oursins et de polypiers, témoins de l’abondance de la vie marine à cette époque.
Dans une mer progressivement moins profonde, le dépôt du calcaire du « banc royal » marque une nouvelle étape. Ce calcaire non gélif, homogène, particulièrement riche en foraminifères, se distingue par ses qualités exceptionnelles comme pierre à bâtir, ayant été largement utilisé dans la construction.
– Lutétien supérieur : Une troisième transgression, bien que de faible amplitude, modifie l’environnement en formant un système de lagunes peu profondes. Ces conditions favorisent le dépôt de marnes (mélange de calcaire et d’argile) et de caillasses, un matériau composite constitué de calcaire grossier, de marne, de silice, de sable et de gypse. Ces couches sédimentaires, presque azoïques (pratiquement dépourvues de vie animale et donc de fossiles), témoignent des conditions moins favorables à la biodiversité marine.
Des fouilles réalisées en 1977 sur le site de la Défense ont toutefois révélé des indices suggérant l’existence d’une faune terrestre riche et diversifiée, évoluant dans un paysage de savane entourant les lagunes, semblable à celle, exceptionnellement bien conservée, de Messel en Allemagne.
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Etage Bartonien
L’étage Bartonien, nommé d’après la ville Barton en Angleterre marque la phase terminale de « l’Eocène » (ligne de rivage n°4). À cette époque, le Bassin parisien est recouvert de lagunes propices à la formation de gypse. Ce dernier, un sulfate de calcium, se forme par précipitation du sel de mer dans les lagunes lorsque celles-ci s’assèchent.
Le gypse, exploité intensivement par l’homme, est transformé après cuisson et réduction en poudre en plâtre industriel et en plâtre de moulage. Le fameux « plâtre de Paris », issu de ce processus, est particulièrement prisé pour sa qualité et son utilisation dans les travaux de construction, de sculpture et d’ornementation.
Bien que moins riche en mollusques et en foraminifères que l’étage Lutétien, le Bartonien conserve une faune relativement bien préservée.
Ainsi s’achève le cycle des transgressions/régressions marines qui caractérise l’Éocène,
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2-1-2 Epoque Oligocène (38 Ma – 24,6 Ma)
L’Oligocène signifiant ‘après l’aube de la vie’ est marquée par la plus importante transgression marine du Cénozoïque. Cet événement permet à la mer de progresser par la vallée de la Seine et de se retirer ensuite par la vallée de la Loire inférieure.
L’épisode appelé Rupélien (anciennement « Stampien*« ), du nom de Rupel, rivière affluente de l’Escaut en Belgique, est particulièrement notable. Cet épisode dépose les célèbres sables de Fontainebleau, formant la ligne de rivage n°5. Ces sables blancs, d’une pureté exceptionnelle et d’une finesse remarquable, sont déposés en couches de 10 à 70 m d’épaisseur. Ils affleurent en divers endroits de la forêt de Fontainebleau et présentent une teneur en silice supérieure à 99,5 %. Ils sont utilisés par l’industrie pour la fabrication du verre optique de haute qualité.
*L’épisode « Stampien » nommé d’après la ville d’Etampes
A la fin de l’Oligocène, qui marque la clôture de la période Paléogène, le Bassin parisien se retrouve isolé de la mer du Nord et de la Manche.
>> Le Bassin Parisien devient alors un espace continental qui perdure jusqu’à nos jours.
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2-2 Période Néogène (Neos: nouveau et Genos: race > les nouvelles races)
2-2-1 Epoque Miocène (24,6 Ma – 5,3 Ma)
Cette époque est marquée par l’aplanissement progressif du Bassin parisien, accompagné de la formation du réseau hydrographique qui, dans ses grandes lignes, correspond à celui que nous connaissons aujourd’hui.
À cette époque, le cours supérieur de la Loire, ainsi que l’Allier, sont encore connectés au réseau de la Seine, témoignant d’un agencement fluvial différent de celui que nous observons actuellement.
Des apports sédimentaires massifs en provenance du Massif Central enrichissent les dépôts du Bassin. Ce phénomène est directement lié au soulèvement tectonique et à l’intense activité volcanique qui affectent cette région au cours du Miocène.
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2-2-2 Epoque Pliocène (5,3 Ma – 1,8 Ma)
Le début du Pliocène est marqué par un nouveau soulèvement abrupt du Bassin parisien, conséquence indirecte de la tectonique alpine.
Ce soulèvement provoque une incision prononcée des vallées fluviales, redéfinissant les cours d’eau. C’est à cette époque que le tracé actuel de la Seine prend forme, tandis que la Loire se détourne vers l’Atlantique, adoptant son cours actuel.
>> Ces transformations géomorphologiques annoncent la transition vers une configuration proche de celle de notre ère.
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2-2-3 Epoque Pleistocène (1,8 Ma – actuel)
Pendant l’Époque Pléistocène, le Bassin parisien subit l’influence d’un climat périglaciaire, car la limite méridionale des glaciers se trouve au niveau des Ardennes. Les cycles glaciaires et interglaciaires provoquent des variations importantes du niveau des mers, entraînant l’émergence de la Manche et un encaissement accentué des vallées fluviales.
L’érosion façonne un paysage dénudé, amorçant le relief qui deviendra celui de l’ère actuelle.
>> Depuis la fin de la dernière période glaciaire, il y a environ 10 000 ans, ce relief s’est progressivement couvert d’une végétation caractéristique des zones tempérées, composée de forêts, prairies et zones humides. Les premières traces de vie humaine apparaissent dans le Bassin parisien, témoignant de la présence d’hominidés qui exploitent les ressources locales pour leur subsistance.
Bibliographie
Léonard GINSBURG et Al : Découverte d’une faune de Mammifères dans le Lutétien supérieur de la Défense, à Puteaux, près Paris ( Hauts-de-Seine). Soc. géol. Fr., 1977, fasc. 6, p. 311-313
JP Gély: le Lutétien, une période charnière de l’histoire du Bassin parisien. Article publié sur le site de la SAGA