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L’ÂGE DE LA TERRE

Une exploration à travers le temps et les cultures

Chroniques-de-Nuremberg

La création du monde — Chronique de Nuremberg (1493) – Hartmann Schedel 

Depuis les premières civilisations humaines, la question de l’origine de la Terre a fasciné les esprits, donnant naissance à une multitude de récits et de mythes à travers le monde. Ces récits, souvent enracinés dans des traditions orales puis transcrits dans des textes sacrés, proposent diverses visions de la création de la Terre. Dans beaucoup de ces mythes, la Terre est perçue, émergeant du chaos primordial, comme le résultat d’une intention divine, une entité vivante et sacrée. Les mythologies, qu’elles soient issues de l’Inde antique, des peuples nordiques, ou des civilisations mésoaméricaines, partagent une vision symbolique et métaphorique de la naissance de notre planète, où le temps et l’âge ne sont pas des préoccupations centrales. Pourquoi les mythologies créationnistes ne se préoccupent-elles pas de la durée de l’existence Terrestre ? Pourtant, calculer un âge pour la Terre n’a de sens que si l’on accepte l’idée d’une naissance, d’un commencement. Or, pour beaucoup des traditions anciennes, la Terre, même si elle émerge du chaos ou est façonnée par des dieux, échappe à la temporalité humaine. Elle est à la fois ancienne et intemporelle, existant au-delà des âges. Dans cette perspective, l’idée même de mesurer son âge devient superflue, sinon impossible.
En contraste, la philosophie grecque antique, notamment à travers la pensée d’Aristote, propose une vision de l’univers comme éternel, sans commencement ni fin, traversant cependant pour les Stoïciens, un cycle perpétuel de destruction et de renaissance. Dans ce contexte d’éternité, calculer un âge pour la Terre n’a aucune pertinence.

Avec l’avènement des religions abrahamiques, une nouvelle perspective émerge : la création divine de la Terre en un temps déterminé. La Genèse, texte fondateur des traditions juive et chrétienne, introduit une chronologie précise à travers la généalogie des patriarches, permettant aux érudits de calculer l’âge de la Terre. Ces calculs, bien que variés, ont longtemps dominé la pensée occidentale, fixant l’âge de la Terre à quelques milliers d’années. Un temps court.

Cet article explore ces différentes visions du monde, depuis les mythologies créationnistes, en passant par l’idée d’éternité chez Aristote et les Stoïciens, puis la prédominance de la chronologie biblique jusqu’à l’émergence de la démarche scientifique qui a conduit à partir du XVIIIe siècle à la découverte du temps profond et au XIXe siècle à la datation moderne de la formation de la Terre. Nous verrons comment la perception de l’âge de la Terre a évolué au fil du temps à travers les âges et les cultures.

1 – Les mythologies créationnistes de la Terre

Ces récits, transmis oralement pendant des millénaires illustrent la volonté divine de créer un monde stable et habitable à partir du chaos primordial.

Mythologie mésopotamienne :
  • Dans l’épopée babylonienne « Enuma Elish », la Terre est formée à partir du corps de la déesse Tiamat après sa défaite par le dieu Marduk. Les parties de son corps sont utilisées pour créer le ciel et la Terre établissant un ordre cosmique.

Mythologie égyptienne :
  • Atoum : Le récit de la création le plus célèbre en Égypte ancienne provient d’Héliopolis (ville du soleil). Selon ce mythe, la création de la Terre est un acte du dieu Atoum, qui émerge du chaos primordial, souvent représenté par le Noun, une vaste étendue d’eau informe.

Mythologie hindoue :
  • L’Hymne de la Création (Nasadiya Sukta) du Rig-Veda explore les mystères de la création de l’univers, exprimant une humilité devant le mystère de l’existence et suggérant que même les dieux pourraient ne pas connaître l’origine ultime du cosmos.
    Voici un extrait du Nasadiya Sukta :
    « D’où est née la création, d’où est-elle venue ?Les dieux sont venus après la formation de ce monde.Alors, qui sait d’où il provient ?
    D’où est venue cette création, peut-être qu’il la forma, peut-être qu’il ne l’a pas formée.Celui qui dans les cieux les plus hauts en a la surveillance, Lui seul le sait — ou peut-être ne le sait-il pas. »
    Ce texte exprime une humilité profonde devant le mystère de l’existence, suggérant que même les dieux pourraient ne pas connaître l’origine ultime du cosmos.
Mythologie chinoise :
  • Pan Gu : La mythologie chinoise décrit la formation du ciel et de la Terre par Pan Gu, émergeant d’un œuf contenant le cosmos entier, libérant ainsi l’univers et créant la Terre.

Mythologie japonaise :
  • Izanami et Izanagi : Dans le mythe japonais de la création, les dieux Izanagi et Izanami sont chargés de créer la Terre. En utilisant une lance céleste, ils remuent l’océan primordial, et les gouttes qui en tombent forment les premières îles du Japon. Ces îles deviennent les premières terres solides, et Izanagi et Izanami continuent à créer d’autres terres et divinités. Transcription des 712 ap. J.-C.

Mythologie nordique :
  • Ymir : Un géant primordial, Ymir est tué par Odin, le dieu des dieux, et ses frères, et son corps est utilisé pour créer la Terre. Cette création est à la fois un acte de formation et de destruction. Sa chair devient la terre, son sang forme les océans, ses os deviennent les montagnes, et son crâne le ciel. Cette création est à la fois un acte de formation et de destruction.

  • Ragnarök : Dans la mythologie nordique, le Ragnarök est l’événement apocalyptique où les dieux, les hommes, et l’univers tout entier sont détruits. Après cette destruction, un nouveau monde est censé émerger, plus pur et fertile.
Mythologie aztèque
  • Selon la mythologie aztèque, les dieux Tezcatlipoca et Quetzalcoatl ont créé la Terre après avoir vaincu le monstre primordial Cipactli, une créature qui vivait dans les eaux du chaos. Les dieux ont attiré Cipactli hors des eaux et l’ont démembré pour créer le monde. Les différentes parties du corps de Cipactli ont été transformées pour former la Terre et le ciel. Sa tête est devenue le ciel, tandis que son corps a formé la terre ferme, les montagnes et les vallées.

  • Les Aztèques pensaient aussi que l’histoire du monde est cyclique et croyaient en une succession de « Soleils » ou époques, chacune se terminant par une destruction avant la recréation du monde. Par exemple, ils vivaient sous le Cinquième Soleil, qui était destiné à être définitivement détruit par des tremblements de terre.

 

>> Ces différents récits mythologiques proposent la création de la Terre comme une émergence ordonnée du chaos primordial, façonnée par des actions divines. Ce processus, symbolique ou métaphorique, échappe souvent à la temporalité humaine, se situant à la fois dans l’ancienneté et l’intemporalité et n’accorde pas d’importance à la datation précise de la création de la Terre.

Ces exemples illustrent aussi la prédominance du concept de destruction cyclique et de régénération de la Terre. Cette notion de perpétuelle transformation transcende les époques et les cultures. On retrouve cette idée, sous diverses formes, dans de nombreuses traditions philosophiques et mythologiques à travers l’histoire. 

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ANTHROPOCÈNE or not ANTHROPOCÈNE ?

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Photographie et témoignage d’Edward Burtynsky (mars 2020)

Edward Burtynsky capture l’essence de l’Anthropocène dans sa photographie des mines de potasse de Berezniki (Sibérie), illustrant parfaitement la fusion entre les processus géologiques naturels et l’intervention humaine : « C’est dans les mines de potasse, sous les fondements de Berezniki, une ville russe de Sibérie centrale, que j’ai pris cette photographie…Un ancien fond marin tapissé de couches aux couleurs vives : la potasse recouverte de stries orange et les lignes sinueuses tracées par l’intense pression du sol. Cependant, les empreintes des coquilles de nautile (plutôt ammonites, ndlr) ont été dessinées par une machine que les mineurs appellent la moissonneuse-batteuse. Celle-ci creuse des tunnels avec des disques tournants de part et d’autre. Lorsque la machine fait marche arrière, elle sculpte ces médaillons dans la roche. » (National Geographic, mars 2020).


« Une bonne physique terrestre doit comprendre la météorologie, la géologie et la biologie ». Jean-Baptiste de Lamarck, Hydrogéologie (1802).


 

Transformations de la surface de la terre

La Terre, âgée d’environ 4,5 milliards d’années, a connu de nombreuses transformations avant l’apparition de l’homme :

  • Les cyanobactéries (3,5 milliards d’années) ont été les pionnières de la production d’oxygène. elles ont initié la « Grande Oxygénation », modifiant radicalement l’atmosphère terrestre.

 

  • Les plantes, en colonisant la surface terrestre, ont réduit l’albédo (réflectivité de la lumière solaire), contribuant à une hausse de la température moyenne de la planète.
  • L’explosion cambrienne (540 millions d’années) a marqué l’émergence d’une diversité biologique sans précédent avec l’apparition des principaux embranchements animaux, établissant les fondements de la biodiversité moderne.
  • Les extinctions massives : La Terre et les organismes vivants ont ensuite continué à interagir. Cinq grandes extinctions ont façonné l’évolution de la vie, la dernière ayant eu lieu il y a 66 millions d’années, entraînant la disparition des dinosaures non aviens et des ammonites.

 

L’empreinte des hominidés sur leur environnement s’est progressivement manifestée : domestication du feu, utilisation d’outils, sédentarisation et urbanisation, développement de l’agriculture et de l’élevage, et utilisation des premières énergies provenant du bois et du charbon.

En 1784, l’Écossais James Watt a déposé un brevet pour une locomotive à vapeur. Le développement des machines à vapeur, avec 500 machines Watt en service dès 1800, associé à l’exploitation intensive des mines de charbon, a marqué le début de la révolution industrielle. Cette avancée technologique a entraîné l’activité humaine vers des niveaux jamais atteints auparavant.

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L’Etat affecte le domaine de Grignon à un projet d’intérêt général

Communiqué du Conseil d’administration de Grignon 2000 le 14 juin 2024

C’est une étape décisive qui vient d’être franchie. Nous apprenons par le quotidien « La Lettre » de ce jour que les services du Premier Ministre décident de conserver Grignon. Nous saluons cette décision conforme à l’ambition de Grignon 2000.

Depuis 2016, c’est un groupe de pionniers mené par Georges d’Andlau et Hervé Lecesne qui a patiemment monté Grignon Campus, un projet  ambitieux pour la transition écologique, réaliste sur le plan économique et ouvert sur son territoire et pour les franciliens. Nous constatons avec plaisir que l’Etat reprend à son compte notre proposition.

Grignon reste donc au service de l’intérêt général avec AgroParisTech comme représentant de l’Etat. Il établit un partenariat public privé au service de la rénovation du patrimoine de la première école d’agronomie de France. Au travers d’une société universitaire locale immobilière,  les partenaires privés, les collectivités locales et l’Etat donneront un nouveau souffle à ce joyau francilien.

Nous nous félicitons de constater qu’aujourd’hui c’est la raison qui l’a emporté. Notre modèle économique construit patiemment avec des partenaires est repris en grande partie d’après les informations disponibles.

Notre association et le consortium de partenaires et d’investisseurs qu’elle a constitué sont évidemment prêtes à jouer un rôle significatif dans la construction du futur du domaine. C’est une opportunité en or pour la transition écologique des systèmes agricoles et alimentaires.

La désignation d’un Président et d’un futur directeur général est la dernière étape avant le lancement du projet. Nous espérons que le contexte politique ne retardera pas cette nomination. Trop de temps a été perdu et le domaine s’abime, il est temps de se projeter dans un futur nouveau pour Grignon, de faire l’unanimité et de passer à l’action.

Nous félicitons les fonctionnaires mobilisés pour faire avancer le dossier et l’ensemble des associations et des partenaires qui nous ont permis de convaincre l’Etat. Nous remercions surtout les élus locaux et notamment Nadine Gohard, maire de la commune, pour leur engagement en faveur de l’intérêt général.

Nous restons déterminés pour que ce projet d’intérêt général soit aujourd’hui entièrement dédié à la transition écologique des systèmes agricoles et alimentaires. Nous nous réjouissons de pouvoir participer à la construction des prochaines étapes.  Le conseil d’administration de Grignon 2000.                        

                                                                                   Le communiqué complet : ici

Les mosaïques de coquilles mésopotamiennes

Soldat menant un prisonnier nu – coquille nacrée et schiste – provenance Mari, basse Mésopotamie – env. 2600 BC – Musée d’Alep – © B. Couturaud 2009.

1- La Mésopotamie : berceau de la Civilisation

La Mésopotamie, dont le nom signifie étymologiquement « le pays entre les fleuves », est une région historique du Moyen-Orient située entre le Tigre et l’Euphrate. Elle est le berceau de la première sédentarisation humaine, ainsi que des débuts de l’agriculture et de l’élevage. C’est également en Mésopotamie que le premier système d’écriture fut créé entre 3400 et 3200 av. J.-C., évoluant ensuite pour donner naissance à l’écriture cunéiforme.

  • La Période des Dynasties Archaïques

La période sumérienne dite « des Dynasties archaïques » (vers 2900 – 2340 av. J.-C.) marque l’apparition des premières cités-royaumes autonomes, des premiers rois et des premières dynasties historiques. En basse Mésopotamie, « Le pays de Sumer » était alors divisé en petits royaumes, tels Eridu, Lagash, Larsa, Uruk, Ur et Kishet. En haute Mésopotamie, les principaux royaumes sont Ninive, Assur et Mari. Chacune de ces cités dominait un modeste territoire, avec à sa tête un dieu tutélaire et un roi. Le dieu possédait de vastes domaines administrés par le souverain, qui était son représentant sur terre et avait pour devoir de lui bâtir des temples.

Aussi appelée époque Présargonique, cette période précède la création de l’empire d’Akkad, fondé par Sargon d’Akkad, qui conquit et domina la Mésopotamie de la fin du XXIVe au début du XXIIe siècle av. J.-C.

 

 

2- L’Art de la Nacre dans les Cités d’Ur et de Mari

Au cœur de la Mésopotamie antique, les cités puissantes d’Ur et de Mari ont révélé au monde une splendeur artistique unique à travers leurs mosaïques incrustées de coquilles marines. Ces œuvres d’art, témoins d’une civilisation florissante, allient la richesse des matériaux naturels à la finesse du travail artisanal. 

  • L’utilisation des coquilles nacrées ou non

 

La principale utilisation des coquilles marines était la production de perles de toutes formes, de colliers, d’anneaux, d’ustensiles domestiques, de supports de gravures, de sceaux-cylindres et d’incrustations dans des statues ou des mosaïques. Ces objets appartenaient principalement aux élites.

 

De fait, les fouilles ont révélé l’existence d’ateliers de taille de coquilles à l’intérieur des palais. Ce qui induit une activité sous le contrôle d’une élite réservée à son usage.

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C’est une charmante compagnie que les géologues…

 

« Assis sur mon granit, je me livrais à de rancunières réflexions sur l’hypocrite tyrannie des pères, que seconde souvent si mal à propos la soumission par trop angélique des filles. Dans ce moment vint à passer une autre caravane à laquelle je me joignis faute de mieux, et aussi pour combattre par la distraction les blessures du sentiment.

Cette caravane se composait de trois messieurs à pied et d’un mulet chargé de pierres. Ces messieurs étaient des géologues. C’est une charmante compagnie que les géologues, mais pour les géologues surtout.

Leur manière est de s’arrêter à tout caillou, de pronostiquer à chaque couche de terre. Ils cassent les cailloux pour en emporter ; ils égratignent les couches pour faire un système à chaque fois : c’est fort long. Ils ne sont pas sans imagination, mais cette imagination a pour domaine le fond des mers, les entrailles de la terre ; elle s’éteint dès qu’elle arrive à la surface. Montrez-leur une cime superbe : c’est une soufflure ; un ravin rempli de glaces : ils y voient l’action du feu ; une forêt : ce n’est plus leur affaire. A mi-chemin de Vallorcine, un mauvais éclat de rocher sur lequel je me reposais mit mes trois géologues en émoi : il fallut me lever bien vite et leur abandonner mon siège. Pendant qu’ils le mettaient en pièces, je m’éloignai tout doucement et ils me perdirent de vue. Sic me servavit Apollo (Ainsi m’a sauvé Apollon, ndlr).

Toutefois, s’il m’arrive d’éviter le géologue, j’aime en tout temps la géologie. L’hiver surtout, au coin du feu, qu’il est charmant d’entendre raisonner sur la formation de ces belles montagnes que l’on a visitées durant les beaux jours, sur le déluge et sur les volcans, sur la grande débâcle et sur les soufflures, sur les fossiles surtout ! Quand on en est aux fossiles, je ne manque jamais d’introduire dans l’entretien le grand Mastodonte de je ne sais qui ; ou le Megalosaurus de Cuvier : c’est un grand lézard de cent vingt pieds de long, dont nous n’avons plus que les os moins la peau. Mais figurez-vous donc cette bête royale se promenant au travers de l’ancien monde, et nourrissant sa petite famille d’éléphants en guise de moucherons ! Vivent les pittoresques ! ils propagent, ils popularisent la science : c’est là que j’ai appris toute ma géologie.

Au surplus, même sans les pittoresques, qui n’est un peu géologue ? Qui ne se demande, à la vue des accidents ou des merveilles qu’étale une montagneuse contrée, comment se sont ouverts ou creusés ces abîmes ; comment ces cimes se sont élevées dans les cieux ; pourquoi ces pentes douces et pourquoi ces rocs tourmentés ; d’où viennent ces colosses de granit qui pèsent sur la plaine, ou ces dépouilles marines enfouies aux montagnes ? Ces questions sont de la géologie pure, à la fois élémentaire et transcendante : les géologues ne s’en adressent pas d’autres ; bien plus, sur la façon de les résoudre ils ne sont jamais d’accord : c’est l’eau, c’est le feu, c’est l’érosion, c’est la soufflure. Partout des systèmes et nulle part des vérités ; beaucoup d’ouvriers, point d’experts ; des prêtres, et point de Dieu ; en telle sorte que chacun peut approcher son hypothèse de la flamme de l’autel, et dire en la voyant flamber : « Fumée pour fumée, la mienne, monsieur, vaut la vôtre. »

Et c’est précisément par là que j’aime cette science. Elle est infinie, vague, comme toute poésie. Comme toute poésie, elle sonde des mystères, elle s’y abreuve, elle y flotte sans y périr. Elle ne lève pas les voiles, mais elle les agite, et, par de fortuites trouées, quelques rayons se font jour qui éblouissent le regard. Au lieu d’appeler à son aide les laborieux secours de l’entendement, elle prend l’imagination pour compagne, et elle l’entraine dans les profondeurs ténébreuses de la terre, ou bien, rebroussant avec elle jusqu’aux premiers jours du monde, elle la promène sur de jeunes et verdoyants continents, tout fraichement enclos du chaos, tout brillants de leur primitive parure, et que foulent ces races perdues, mais dont les gigantesques débris nous révèlent aujourd’hui l’existence. Si elle n’arrive pas à un terme, en y tendant elle parcourt une route attrayante ; si elle divague ou déraisonne sur les causes secondes, sans cesse et de toutes parts, et en vertu de son impuissance même, elle nous met face à face avec la cause première : et c’est pour cela que, toujours aimée, toujours cultivée, cette science est aussi antique que l’homme.

La Genèse en est le plus vieux et le plus sublime traité, et, chez le peuple poète par excellence, chez les Grecs, les théogonies, les cosmogonies abondent dès le premier âge ; dès lors, comme aujourd’hui, les Vulcaniens, les Neptuniens s’y disputent, non pas, à la vérité́, les suffrages du monde savant, mais l’admiration naïve, l’oisive curiosité́, le poétique sentiment d’une foule intelligente et crédule. » Rodolphe Töpffer – La vallée de Trient‘. 

Cette nouvelle La vallée de Trient est parue pour la première fois en 1841 dans l’ouvrage ‘Nouvelles genevoises’. Trient est une commune du Valais suisse, située à 15 km d’Argentière Chamonix-Mont-Blanc. 

Microfossiles de la falunière

"Il y a quelque temps déjà, nous avons préparé, avec Jean-Michel et Hervé, une séance consacrée à la micropaléontologie. L’idée de base était de montrer les petits éléments indéterminés (incertae sedis) de nos collections afin, nous l’espérions, de faire la lumière sur certains d’entre eux. Cependant, au fil de nos discussions, nous avons décidé d'élargir le champ de notre présentation en offrant un panorama plus exhaustif de la diversité des microfossiles présents à Grignon.

Suite à cette réunion, dédiée à ce que nous avions appelé de manière informelle les « micro-curiosités », et grâce aux échanges ainsi qu'aux recherches qui ont suivi, nous avons réussi à identifier une partie des éléments que nous avions présentés ce jour-là. Malgré ces avancées, un certain nombre d'éléments demeurent des 'Incertae sedis', étant toujours indéterminés à ce jour." Delphin

Voici donc ci-dessous le bilan de cette séance du 11 décembre 2021.

Les microfossiles présentés proviennent de la falunière de Grignon. Ils ont été sélectionnés et photographiés par Jean-Michel, Hervé et Delphin.

                                Sommaire

** Bryozoa ** Foraminifera ** Mollusca ** Dasycladaceae ** Echinidae ** Porifera  ** Serpulidae  ** Incertae sedis
  • Bryozoa

Les bryozoaires sont de minuscules animaux marins vivant en colonies, fixés sur des substrats durs. Chaque individu (zoïde) est composé d’un exosquelette calcifié.

1.  cf Hornera crispa DEFRANCE, 1821. 9mm. 2.  Bryozoa indéterminé sur support. 0,6mm. 3-4-6.  cf Crisia ind. (3. 1mm ; 4. 1,6mm ; 6. 1,9mm).  5.  cf Crisia ind. ; cf Porella ind. ; cf Schizoporella ind. 1,7mm.

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La série de planches photos des microfossiles est associée à la collection de la falunière.

Les vœux du Conseil d’Administration

Bonjour à tous,
 
Notre prochaine Assemblée Générale aura lieu le samedi 30 mars 2024, au pigeonnier de Grignon, à 10h00.
L’AG sera suivie d’un buffet convivial sur place. 
Réservez la date dans vos agendas !
 
Cette AG 2024 fera le bilan de nos activités en 2023 pour nos sections « Paléo » et « Atelier ». 
Elle sera aussi l’occasion de faire le point sur les solutions envisagées pour résoudre nos difficultés d’hébergement.
 
L’AG sera suivie de l’élection du Conseil d’Administration du club. 
=> N’hésitez pas à vous porter volontaire pour prendre la responsabilité d’une activité.
Le club ne vit que grâce aux activités bénévoles de ses membres, et chaque contribution est précieuse ! 
Même des tâches assez légères nous aident à faire vivre le club (par exemple : recensement des matériels d’une section, recensement de nos collections, mise à jour de la liste des adhérents, relations avec les adhérents, magasinage de nos équipements, etc., etc.)
 
Par ailleurs, la recherche de locaux pour chacune des deux sections, ou pour les deux ensembles, 
la recherche de capacité de stockage pour tout ou partie de nos matériels et équipements, 
la recherche de salles de réunion, 
ou la recherche de partenaires pouvant abriter certaines de nos activités, 
sont actuellement nos priorités pour assurer la survie du club au-delà de cette année. 
 
Merci à vous tous de prospecter autour de vous afin de nous aider à trouver des solutions qui assureront la pérennité de notre club. 
A ce jour, nous n’avons de solution pérenne ni pour la section Atelier à Paris, ni pour la section Paléo à Grignon. 
 
Comptant tous sur votre mobilisation pour cette année 2024, qui sera décisive pour la survie de notre belle association, le Conseil d’Administration du Club Géologique Île-de-France souhaite à tous ses adhérents, et à leur famille, une excellente année 2024  !
 
Amicalement, 
 
Le Conseil d’Administration du Club Géologique île de France 
 

Recherche de locaux

Il y a « périls en nos demeures » :
  • Expulsé de son local parisien actuel avant mi-2024, le Club recherche activement un local à Paris. Courrier envoyé le 12 déc. 2023 à la Commission d’attribution de locaux associatifs de la Ville de Paris ici.
  • Dans la perspective d’être également expulsé de son local/pigeonnier à Grignon, un dossier de présentation du Club à Grignon est disponible ici.
     

Atelier…boucles d’oreilles

Dégotée par Daniel dans les entrailles de l’atelier, une caisse de fossiles, dont la provenance n’est pas spécifiée, a échauffé les imaginations. 

Il s’agit essentiellement de Potamides tricarinatum, Batillaria pleurotomoïdes, Ampullina parisiensis, Potamides cordieri, Pugilina subcarinata, Cantharus polygona, qui ressemblent fortement à la faune de La Chapelle/Plailly en Serval (Oise) ; donc sans doute des fossiles du Marinésien, sous-étage du Bartonien.

DEPUIS QUAND L’HUMAIN SE « FAIT-IL BEAU » ?

L’idée a rapidement germé de reproduire les coutumes d’Homo sapiens qui depuis au moins 150000 ans à utilisé des coquillages pour s’en faire des parures : l’utilisation des coquillages comme parures dans les temps préhistoriques témoigne de la créativité artistique et de l’importance culturelle des populations anciennes. Ces parures en coquillages étaient non seulement des ornements esthétiques, mais aussi des objets chargés de sens et de symbolisme au sein de leurs sociétés.

L’utilisation des coquillages comme parures n’était pas limitée à une seule période préhistorique, mais a persisté à travers différentes cultures et époques, parfois même jusqu’à nos jours… 

…Avec la perceuse et mèche ultra-fine apportée par Michel, et les attaches et agrafes par Mégane, la fabrication a pu commencer : choix des plus belles et plus robustes coquilles, opération de perçage au niveau des labres puis montage et essai.

Les premières évocations des fossiles du bassin parisien

Athleta (volutospina) spinosus (Linnaeus, 1758) – Présentation actuelle (2023) au MNHN, galerie de Paléontologie

Les fossiles du bassin parisien ont depuis le Paléolithique été reconnus par les hommes pour leur qualité décorative et utilisés comme objet de parure (voir article rencontres géosciences de D.Merle).

Les archéologues ont découvert que nos ancêtres avaient déjà une relation privilégiée avec les coquillages fossiles ou non. Outre la collecte pour leur consommation et leur échange, il est attesté que depuis 100 000 ans les hommes utilisent les coquillages pour confectionner des parures et pour accompagner les rites funéraires. 

Objets de parure découverts dans le niveau IV40, l’Habitat n°1, IV213 et IV20 de Pincevent. 1-2 et 24-50 : Crommium sp., 3-4 : Rhinoclavis sp. , 5 : Capulus sp., 6 : Athleta sp., 7 : Battillaria pleurotomoides, 8 : Potamides angulosus, 9 et 56: Turritella oppenheimi, 10 : spire interne de gastéropode, 11 : piquant d’oursin, 12 et 55 : dent de requin, 13 : moule de ver, 14 ammonite, 15 : bélemnite, 16 : galet perforé, 17 : galet en cours de perforation, 18-23 : incisive de renne sciée, 51-52 : Ancillarina buccinoides, 53 : Olivella sp., 54 : Natica cepacea, 57-58 : perle en lignite, 59 : Dentalium spLe site préhistorique de Pincevent (La Grande Paroisse, Seine-et-Marne) dans la vallée de la Seine est le plus grand gisement magdalénien découvert en Europe. Il a livré les vestiges d’un campement magdalénien saisonnier de chasseurs de rennes datant d’environ 12 300 ans. Des parures à base de fossiles de l’éocène y ont été découvertes. L’analyse en est faite par Marian Vanhaeren dans un article publié sur le site Persée : « La parure, de sa production à l’image de soi – Un dernier hiver à Pincevent, les Magdaléniens du niveau IV0″.

Depuis au moins l’antiquité romaine, les pierres à bâtir en Île-de-France sont intensivement extraites dans des carrières du calcaire grossier parisien (Oise, Paris et ses environs immédiats) : ces roches sédimentaires carbonatées contenues dans cette couche sont très indurées, homogènes et coquillières. Elles renferment de nombreuses coquilles fossiles datant du Lutétien, dont les plus caractéristiques sont de grands foraminifères marins, les nummulites.  

On trouve trace de la première évocation des fossiles du bassin parisien dans la littérature à partir du XIIIe siècle : sous la plume d’Albert le Grand, ils apparaissent en tant qu’éléments organiques provenant d’animaux disparus. 

  • Albert le Grand

Albert le Grand (1200-dominicain, enseignant imprégné d’Aristote et d’Avicenne. Egalement naturaliste, il accorde une grande importance à l’expérience et à l’observation systématique et objective. Un brachiopode fossile Albasphe albertimagni [1] lui a été dédié. Concernant l’origine des fossiles on peut découvrir dans le texte De causis proprietatum elementorum(Des propriétés des éléments) les notions de transgression et régression marine ainsi qu’une des premières évocations des fossiles du bassin de Paris : « Nous trouvons une preuve de tout cela (le recul de la mer) dans les restes d’animaux aquatiques (…) ; l’eau sans doute les y a amenés avec le limon gluant qui les enveloppait ; le froid et la sécheresse de la pierre les ont ensuite préservés d’une putréfaction totale. On trouve une très forte preuve de ce genre dans les pierres de Paris, en lesquelles on rencontre très fréquemment des coquilles, les unes rondes, les autres en forme de croissant de Lune, les autre encore bombées en forme d’écaille de tortue. »

Ce texte n’est pas sans rappeler celui de Strabon, géographe et historien grec (v.  ap. J.-C.) dans lequel il relate son voyage en Egypte (v. 25 : « A 40 stades au delà de Memphis, règne une côte montagneuse sur laquelle se dressent plusieurs pyramides, qui sont autant de sépultures royales. Trois de ces pyramides sont particulièrement remarquables…En visitant les pyramides, nous avons observé un fait extraordinaire et qui nous a paru mériter de ne pas être passé sous silence. Il s’agit de gros tas d’éclats de pierre qui couvrent le sol en avant des pyramides et dans lesquels on n’a qu’à fouiller pour trouver de petites pétrifications ayant la forme et la dimension d’une lentille [2] et reposant parfois sur un lit de débris [également pétrifiés] assez semblables … On prétend que ces pétrifications sont les restes des repas des ouvriers qui ont élevé les pyramides, mais la chose n’est guère vraisemblable. Il existe en effet dans une des plaines de notre pays une colline allongée, remplie, comme celle-ci, de fragments de tuf siliceux qui ont aussi cette configuration lenticulaire. » Strabon Géographie Livre XVII, I – 34 Traduction Amédée Tardieu  (1880) sur le site Remacle.org. 

[1] Albasphe albertimagni est un nouveau brachiopode qui possède un septum dorsal avec une cavité intra-septale et des crêtes submarginales dorsales, deux caractéristiques en commun avec Aalenian Zellania Moore, 1855 dont il diffère en l’absence du septum ventral et des crêtes submarginale ventrales. « Unusual brachiopod fauna from the Middle Triassic algal meadows of Mt. Svilaja (Outer Dinarides, Croatia) » 2015 by Adam T. HalamskiMaria Aleksandra BitnerAndrzej KaimTea Kolar-JurkovšekBogdan Jurkovšek.

« Les unes rondes, les autres en forme de croissant de Lune, les autres encore bombées en forme d’écaille de tortue… » : reconnaître dans ces descriptions les différents foraminifères (nummulites, milioles, orbitolites …) présents en grande quantité dans le calcaire grossier lutétien d’Île-de-France .

[2] Ces « lentilles » sont en fait des foraminifères extraits de carrières à nummulites d’âge lutétien et appartenant à une espèce particulières Nummulites gizehensis (Forskall, 1775) 

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